Photo: PNUD Namibie
À l’heure où s’achève une première décennie d’action climatique dans le cadre de l’Accord de Paris, il est essentiel de mesurer les progrès accomplis et tout ce qu’il reste à faire pour lutter contre le changement climatique. La transparence climatique est au cœur de cet effort. En donnant clairement et factuellement à voir la manière dont les pays progressent vers leurs objectifs climatiques, la transparence peut contribuer à garantir la redevabilité et un climat de confiance.
C’est pourquoi l’Accord de Paris a créé le Cadre de transparence renforcé, un processus qui aide les pays à passer à un système de transparence unique et universel. En vertu de ce cadre, les pays soumettent des Rapports biennaux au titre de la transparence qui font le point sur leurs émissions de gaz à effet de serre et leurs progrès dans la mise en œuvre des mesures d’atténuation du changement climatique et d’adaptation à celui-ci, conformément à leur Contribution déterminée au niveau national (CDN).
En Afrique, ces rapports ne se limitent pas à une simple mesure des niveaux d’émissions et au suivi de l’efficacité des politiques climatiques. Dans la région, la préparation des rapports biennaux au titre de la transparence renforce les systèmes de données nationaux, permet aux experts d’acquérir de nouvelles compétences et favorise une plus grande appropriation de l’action climatique.
Le Cabo Verde, la République centrafricaine et la Namibie sont trois des pays africains qui mettent en place des systèmes de préparation des rapports résilients, gérés par les pays eux-mêmes, qui informent, cherchent à susciter une action climatique plus ambitieuse et favorisent le développement durable.
Faire progresser la transparence grâce à la coordination en République centrafricaine
Faisant partie des Pays les moins avancés (PMA), la République centrafricaine est particulièrement vulnérable face aux effets du changement climatique. Or le manque de capacités techniques du pays, l’instabilité institutionnelle et des systèmes de données lacunaires et insuffisants ont limité sa capacité à se préparer à ces effets.
Dans ce contexte, le pays a saisi l’occasion de la préparation de son premier Rapport biennal au titre de la transparence pour renforcer la coordination et améliorer les systèmes nationaux de données. Ce qui aurait pu être un défi s’est au contraire transformé en une démonstration de résilience et d’appropriation nationale croissante de la communication de rapports climatiques. La République centrafricaine est en effet devenue l’un des premiers PMA à soumettre son Rapport biennal au titre de la transparence à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).
Grâce à un processus inclusif et local, le pays a mis en place un réseau de groupes de travail et de coordonnateurs réunissant différents ministères, la Coordination Nationale Climat, l’Université de Bangui et des institutions locales. Cette collaboration a permis d’élaborer un plan d’action commun et de consolider les contributions des différents secteurs pour en faire une description et un inventaire nationaux cohérents.
La forêt tropicale du bassin du Congo, qui s’étend sur six pays et couvre un tiers du territoire de la République centrafricaine, constitue le plus grand puits de carbone forestier au monde. Photo : PNUD République centrafricaine
Les efforts en matière de transparence sont essentiels pour aider la République centrafricaine à évaluer ses besoins en financement et en appui climatique. Photo : PNUD République centrafricaine
Parallèlement, des formations et un soutien technique ont permis de renforcer les capacités techniques du pays. Des experts travaillant dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture et des forêts ont été formés à la mesure, à la notification et à la vérification (MNV) des données climatiques, ce qui a permis d’améliorer la qualité de ces données. En outre, grâce au Réseau francophone sur la transparence, des experts nationaux ont bénéficié d’un appui technique adapté de la part du PNUD, en collaboration avec l’Initiative de renforcement des capacités pour la transparence – Programme d’appui mondial (CBIT-GSP). Cela a aussi permis à ces experts d’entrer en contact avec leurs homologues africains afin de partager les meilleures pratiques.
Ces activités ont permis à la République centrafricaine de montrer que même dans un contexte fragile, la transparence climatique est possible. Bien que des défis subsistent, notamment la nécessité de renforcer et de conserver l’expertise nationale, d’accorder plus de place à la climatologie dans les programmes universitaires et de garantir un financement durable, le pays prévoit de créer une équipe technique multidisciplinaire consacrée à la mesure, à la notification et à la vérification, sous l’égide de la Coordination Nationale Climat. Cette équipe serait chargée de centraliser les efforts en matière de transparence et d’assurer la continuité des progrès. L’expérience du pays montre que la volonté politique, lorsqu’elle se traduit par une coordination institutionnelle forte et s’appuie sur une assistance technique adaptée, peut transformer les défis en résultats durables.
Renforcer l’appropriation nationale du processus de transparence en Namibie
La Namibie est l’un des pays d’Afrique australe les plus touchés par le changement climatique, car ses effets y sont plus forts que dans les autres pays de la région en moyenne. C’est pourquoi la Namibie s’est fortement investie dans l’action climatique et progresse désormais à grands pas en matière de transparence.
Au cours des premières années de préparation de rapports climatiques, et notamment des Rapports biennaux actualisés, la Namibie s’est presque entièrement appuyée sur l’expertise internationale. Au fil des ans, elle a bénéficié d’un accompagnement technique et financier continu de la part de partenaires et d’initiatives mondiales, dont le PNUD, le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) et le Réseau sur la transparence en Afrique anglophone dans le cadre du CBIT-GSP, qui ont contribué à former des experts nationaux, permettant ainsi au pays de finalement prendre la direction du travail de transparence.
Dans ce cadre, la préparation du premier Rapport biennal au titre de la transparence du pays a marqué un tournant. Les experts nationaux, notamment ceux de l’Université des sciences et technologies de Namibie, ont alors joué un rôle de premier plan pour évaluer la situation nationale, suivre les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la CDN, ainsi que préparer et rédiger ce rapport.
Pays le plus aride au sud du Sahara, la Namibie fait de la résilience climatique et de la transparence des éléments clés de sa planification du développement. Photo : PNUD Namibie
La soumission rapide par la Namibie de son premier rapport biennal de transparence témoigne de son engagement proactif à honorer ses obligations climatiques internationales. Photo : PNUD Namibie
L’appropriation du processus de transparence par la Namibie a aussi concerné son inventaire des gaz à effet de serre. En effet, des experts nationaux en énergie ont obtenu la certification nécessaire pour mener les futures évaluations associées, après avoir suivi des formations spécialisées sur le suivi des lignes directrices et l’usage des outils élaborés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).
À l’avenir, des secteurs tels que la gestion des déchets, l’agriculture et l’industrie pourraient grandement bénéficier d’un soutien similaire en matière de renforcement des capacités, d’autant plus que les ministères fonctionnent actuellement avec des unités de lutte contre le changement climatique de taille réduite. Les progrès vers l’adoption de cadres réglementaires pourraient également être accélérés à travers le renforcement du cadre législatif, notamment par une loi sur le changement climatique, et par la mise en place, par l’Agence nationale de statistique, d’un système national de transparence climatique conforme au Cadre de transparence renforcé.
La Namibie, dont l’approche combine expertise locale et soutien externe ciblé, a renforcé la crédibilité nationale et la confiance dans ses rapports sur le climat. Elle prouve que le soutien international est d’autant plus efficace, non pas en tant que substitut, mais en tant que catalyseur des systèmes de préparation de rapports transparents et dirigés par les pays.
Au-delà du renforcement de ses politiques et cadres institutionnels en matière de transparence, la Namibie favorise également une appropriation inclusive et une mise en œuvre participative. Photo : PNUD Namibie
Des systèmes d’information sur le climat novateurs au Cabo Verde
À l’instar d’autres petits États insulaires en développement (PEID), le Cabo Verde se heurte à des défis climatiques uniques. Confronté à l’élévation du niveau de la mer et à la recrudescence des phénomènes météorologiques extrêmes, ce pays redouble d’efforts pour accroître sa résilience face au changement climatique et se positionner comme un pionnier en matière de transparence climatique.
Fort de cet engagement, le Cabo Verde trace une nouvelle voie en matière de gouvernance climatique en instaurant un Système national de transparence climatique. Conçu pour suivre les progrès réalisés dans le cadre des politiques et des engagements climatiques du pays, ce nouveau système répond également aux exigences du Cadre de transparence renforcé. Il regroupe sur une plateforme unique les données relatives aux émissions de gaz à effet de serre, aux mesures d’adaptation et aux flux de financement climatique provenant de multiples secteurs et parties prenantes. Il permet également de suivre les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la CDN et du Plan national d’adaptation (PNA) du pays, et définit les futurs besoins de financement à l’aide d’outils numériques tels que les systèmes d’information géographique pour cartographier les projets, et les marqueurs budgétaires climatiques.
Le changement climatique accentue la fréquence et l’intensité des sécheresses au Cabo Verde, un archipel de dix îles situé au large des côtes atlantiques de l’Afrique de l’Ouest. Photo : Jennifer Baumwoll / PNUD
Grâce à ses efforts en matière de transparence, le Cabo Verde peut suivre la mise en œuvre de sa CDN tout en renforçant son attractivité pour les financements climatiques. Photo : PNUD Cabo Verde
Grâce à ce système robuste, le pays prépare son premier Rapport biennal au titre de la transparence sans le soutien financier du FEM. Le Cabo Verde s’appuie exclusivement sur l’assistance technique du Groupe lusophone sur la transparence, qui permet aux pays de langue portugaise de bénéficier d’un apprentissage entre pairs et d’une expertise ciblée.
La décision du Cabo Verde d’établir son premier Rapport biennal au titre de la transparence sans le soutien du FEM souligne la confiance accordée par ce pays à la solide base d’informations qu’il a constituée. Cela atteste à la fois d’une maturité technique et d’une volonté politique. Le Cabo Verde a tiré les enseignements des précédents cycles de CDN au cours desquels la faiblesse des cadres de suivi entravait les progrès. En investissant dans des systèmes de données durables et en encourageant la collaboration intersectorielle, le Cabo Verde montre que les PEID peuvent établir des rapports au titre de la transparence de haute qualité, en dépit de ressources limitées.
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Le Cabo Verde, la Namibie et la République centrafricaine sont respectivement membres actifs des réseaux régionaux lusophone, francophone et anglophone sur la transparence. Ces réseaux ont été créés dans le cadre de l’Initiative de renforcement des capacités pour la transparence – Programme d’appui mondial (CBIT-GSP), financée par le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) et mise en œuvre par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Les réseaux francophone et lusophone sont codirigés par le PNUD, dans le cadre de l’initiative Climate Promise, grâce aux contributions de la Belgique. Ces réseaux offrent des espaces d’échange entre pairs, de partage de connaissances et d’assistance technique ciblée dans le but de renforcer les équipes nationales et de garantir le développement et le maintien de l’expertise au niveau national.
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