La transparence climatique est essentielle pour débloquer les financements et favoriser le développement

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Une équipe de spécialistes de la division de la recherche hydraulique du Suriname analyse la qualité de l’eau dans le district de Sipaliwini pour évaluer les effets du changement climatique. Photo : Harvey Lisse / PNUD Suriname
Une équipe de spécialistes de la division de la recherche hydraulique du Suriname analyse la qualité de l’eau dans le district de Sipaliwini pour évaluer les effets du changement climatique. Photo : Harvey Lisse / PNUD Suriname
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Comment peut-on prouver que la lutte contre le changement climatique progresse ? Comment peut-on savoir que les engagements nationaux en matière de réduction des émissions responsables du réchauffement de la planète ne sont pas de simples promesses sur le papier ? Comment peut-on faire confiance à des solutions telles que les marchés du carbone et le financement de l’action climatique axé sur les résultats, qui sous-tendent la collaboration internationale en matière d’action climatique ?

Toutes ces questions m’ont été posées à maintes reprises au cours de ma carrière de conseillère en politiques climatiques, par des fonctionnaires, des représentants du secteur privé et des membres de la société civile.

Il existe une excellente réponse à toutes ces questions : la transparence.

Dans le contexte du changement climatique, la transparence fait référence à la mesure fiable, à la reddition de comptes accessibles et à l’examen rigoureux des progrès accomplis par les pays en vue d’honorer leurs engagements climatiques nationaux. C’est le fil conducteur nécessaire pour instaurer la confiance et s’assurer que tout le monde fait sa part pour contenir l’élévation de la température moyenne de la planète en dessous de 2 °C, conformément aux objectifs de l’Accord de Paris.

En raison de son rôle capital, la transparence a été au premier plan des négociations sur le climat ces dernières années. Elle était omniprésente à la COP28, à Dubaï, où le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a mené une véritable campagne de transparence de deux semaines avec le soutien d’organismes de la famille de l’ONU, dont le PNUD. Parallèlement, des géants de la technologie tels que Google et d’autres leaders des solutions numériques ont également mis en évidence les interconnexions entre le big data, la digitalisation et la transparence. En outre, l’année dernière, à Bakou, la présidence de la COP29 a publié une déclaration sur la transparence climatique mondiale, qui souligne le rôle vital de l’amélioration de la transparence dans l’atteinte de nos objectifs climatiques et la création d’un avenir durable pour tous.

La COP29 a également permis de franchir une première grande étape en faveur de la transparence : la soumission de la première génération de rapports biennaux de transparence (BTRs, selon leur acronyme anglais). Dans ces rapports, les pays sont tenus de fournir des informations sur les progrès accomplis dans la poursuite des objectifs de leur Contribution déterminée au niveau national (CDN), sur leurs niveaux d’émissions de gaz à effet de serre et sur le soutien extérieur qu’ils ont reçu ou fourni.

L’aide apportée par le PNUD aux pays en développement en matière de transparence est une entreprise gigantesque qui nécessite une coordination avec d’autres institutions apparentées au système des Nations Unies, dont le secrétariat de la CCNUCC et l’Initiative de renforcement des capacités pour la transparence du Programme mondial d’appui (CBIT-GSP), dirigé par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), ainsi que des donateurs tels que le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) et la Belgique.

Aujourd’hui, grâce au financement du FEM, le PNUD aide 47 pays à élaborer des rapports biennaux de transparence. Vingt-neuf de ces rapports ont déjà été soumis à la CCNUCC. Le PNUD aide également 35 pays à améliorer leurs systèmes de mesure, de notification et de vérification, ainsi que leurs cadres institutionnels, par le biais de projets s’inscrivant dans le cadre l’Initiative de renforcement des capacités pour la transparence. Enfin, grâce au soutien financier de la Belgique et en collaboration avec le PNUE, le PNUD fournit à 35 pays en développement francophones et lusophones un appui technique portant sur les mandats de la CCNUCC, les méthodologies et les outils de transparence.

La transparence est essentielle pour débloquer les financements de l’action climatique permettant de transformer nos économies et de les faire prospérer conformément aux engagements climatiques et aux Objectifs de développement durable. Photo : Mucyo Serge / PNUD Rwanda
La transparence est essentielle pour débloquer les financements de l’action climatique permettant de transformer nos économies et de les faire prospérer conformément aux engagements climatiques et aux Objectifs de développement durable. Photo : Mucyo Serge / PNUD Rwanda

Tout au long de ce parcours, j’ai fait une découverte importante. La transparence est bien plus qu’un simple enchainement de mécanismes isolés de rapportage et d’examen. Elle ne se résume pas non plus à un simple outil destiné à renforcer la confiance dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris. Lorsqu’elle est intégrée dans les institutions gouvernementales et les feuilles de route économiques, la transparence est la clé pour débloquer les financements climatiques provenant de toutes les sources, en vue d’une transformation agile et massive de nos économies, susceptible d’apporter une prospérité compatible à la fois avec les engagements climatiques et les Objectifs de développement durable.

Les pays du monde entier prennent déjà conscience des avantages que la transparence peut procurer. Voici quatre exemples de pays qui exploitent le potentiel de la transparence en vue d’atteindre un objectif ambitieux :

  1. Le Costa Rica fait progresser des programmes politiques intégrés. Dans son premier Rapport biennal de  transparence, soumis en décembre 2024, le Costa Rica a mis en évidence la manière dont le renforcement des zones protégées et des corridors biologiques, en plus de l’émission des paiements pour services liés aux écosystèmes, sont avantageux pour la biodiversité, le stockage du carbone et le renforcement des capacités d’adaptation. Ces mesures ont permis au Costa Rica de porter sa couverture forestière à 60%  du territoire national. Les données contenues dans son Rapport biennal de transparence servent également à orienter l’émission d’obligations garanties à thème et la création de fonds d’investissement verts en tant que véhicules financiers au profit de la biodiversité et de l’action climatique. En outre, le Costa Rica envisage des réformes politiques nationales visant à mobiliser des investissements publics et privés. Il envisage également de recourir aux marchés du carbone pour obtenir des sources de financement supplémentaires.
  2. Le Brésil attire les financements mondiaux en améliorant sa réputation à l’égard des investissements. Le Brésil a soumis son premier Rapport biennal de transparence en décembre 2024, ce qui a permis aux partenaires internationaux et à la communauté mondiale d’investisseurs de constater les grandes avancées en cours de réalisation pour réduire les émissions, s’adapter aux effets du changement climatique et tirer efficacement parti du soutien financier international. En vue d’attirer des aides supplémentaires, le Brésil a lancé la Plateforme d’investissements pour la transformation climatique et écologique du Brésil, destinée à assurer une cohérence entre les flux financiers et la CDN brésilienne mise à jour, dont l’une des cibles est de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 67 pour cent d’ici à 2035, par rapport aux niveaux de 2005. Cette plateforme tire stratégiquement parti des informations contenues dans le Rapport biennal de  transparence, qui souligne les financements requis par l’action climatique et les principaux déficits de financement, de sorte que sa réserve de projets soit en adéquation avec les priorités nationales en matière de climat, en particulier dans les secteurs et régions prioritaires. Cette démarche peut encourager les investissements ciblés et les solutions de financement mixte, en soulignant les domaines où un soutien à des conditions favorables est nécessaire pour combler les déficits de financement et rendre les investissements moins risqués. Cette plateforme d’investissements peut également se référer au Rapport biennal de transparence pour suivre l’avancement des projets au regard des objectifs de la CDN et rendre des comptes transparents aux bailleurs de fonds. Un rapportage transparent dans le cadre du Rapport biennal de transparence renforce donc la crédibilité du Brésil, ce qui contribue à attirer les investissements internationaux.
  3. Le Monténégro renforce sa réglementation et sa planification stratégiques en matière de climat. Les données recueillies par le Monténégro dans le cadre de son processus de Rapport biennal de transparence ont permis d’orienter la révision de la CDN du pays, soumise en février 2025 avec le soutien du PNUD. Sur la base des progrès réalisés, le Monténégro harmonise stratégiquement sa nouvelle CDN, d’un niveau d’ambition plus élevé, avec son Plan national énergie et climat (NECP) s’inscrivant dans le cadre de la Communauté de l’énergie, ce qui soutient les efforts actuels du pays dans le cadre de sa candidature à l’adhésion à l’Union européenne. Le Monténégro adopte également une nouvelle loi sur le changement climatique et un plan d’adaptation aux effets du changement climatique pour la période 2025-2035, dans le droit fil de son engagement à l’égard des normes internationales. En outre, avec le soutien du PNUD dans le cadre de l’Initiative de renforcement des capacités pour la transparence (CBIT, selon leur acronyme anglais) , le Monténégro a mené une analyse approfondie des besoins institutionnels en matière de rapportage sur le changement climatique dans l’ensemble des ministères et des institutions concernés. Cette analyse a ensuite servi de base à la conception d’un programme complet de renforcement des capacités en matière de planification et de rapportage à l’intention des fonctionnaires du pays. Plus de 50 participants issus de différentes institutions prendront part à la première formation de ce programme en juin 2025.
  4. Le Liban place les données au cœur de l’action climatique et du développement. En tant que champion de la transparence dans l’action climatique, le Liban a fixé un cadre institutionnel complet qui s’articule autour du recueil, du partage et de l’archivage des données relatives aux émissions de gaz à effet de serre, aux indicateurs de suivi de la CDN et aux mesures d’adaptation et d’atténuation. Ce cadre a aidé le pays à jeter les bases d’une action climatique transparente et a permis de lancer une série de réformes politiques et fiscales de grande ampleur, qui ont stimulé la transformation des secteurs de l’énergie et des transports, en mettant l’accent sur l’efficacité énergétique et les pratiques durables. Malgré l’aggravation des crises, le Liban a soumis dans les délais impartis son premier Rapport biennal de transparence, avec le soutien du PNUD et le financement du FEM. Il a ainsi prouvé qu’il reste engagé en vertu des cadres climatiques internationaux et qu’il respecte le principe de responsabilité. Envisageant l’avenir de façon stratégique, ce rapport biennal de transparence reconnaît la nécessité d’intégrer les plans de reconstruction et de relèvement du pays à sa future politique climatique. Il définit comment l’action climatique peut permettre de poursuivre des objectifs nationaux tels que l’éradication de la pauvreté, l’égalité des sexes et la sécurité alimentaire. Le PNUD a également contribué à la mise en place du dispositif pour les investissements verts au Liban qui vise à accélérer les efforts d’atténuation du changement climatique et d’adaptation à ses effets à travers le Liban, grâce à des investissements stratégiques dans les énergies renouvelables, l’agriculture durable, la protection de l’eau et les infrastructures résilientes et adaptées au climat (climate-smart, en anglais). Le PNUD continuera à soutenir ce dispositif en préparant et en évaluant ses interventions en attente, ainsi qu’en assurant le suivi de leurs progrès au moyen du système de mesure, de notification et de vérification.

Comme l’illustrent tous ces exemples, améliorer les systèmes de transparence ne permet pas seulement de suivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’accroître la résilience climatique, mais également de remodeler la planification de l’économie et du développement, d’attirer les investissements et de fonder un avenir durable et inclusif, sur la base de données probantes.